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Juillet/Novembre 2003
La Turquie: une longue traversée...



Les premiers mois, Magali aura la chance d'être accompagnée ; visite de son père, d'Orlando (un ami rencontré en Italie) et d'une nouvelle jument puis de sa mère.

15 juillet 2003
Orlando part à pied, motivé. Nous lui chercherons un cheval en cours de route. Le premier jour est terrible pour lui , 30 km dans les bois et broussailles : mais où est le chemin ? Il faut que je m'habitue à ces nouvelles cartes…Orlando demande gentiment " euh, on trouvera un village et de l'eau pour la nuit ? ". Il n'a pas encore confiance…
Il comprend rapidement que lorsque je demande le chemin à une femme, il doit rester à l'écart avec les chevaux sous peine de voir la jeune femme disparaître en courant, camouflée dans son tchador.

18 juillet 2003
Les pieds d'Orlando vont de pire en pire ; j'use toute ma collection de pansements ; ça descend, ça grimpe, ça descend ; ce sont de grosses collines. Au loin sur la droite, on voit la mer de Marmara. Il y a de l'herbe, beaucoup de prairie entre les bois autour des villages. Et merde, je viens d'enliser Cysco en passant un ruisseau. D'un coup de rein, il arrive à se dégager, il tremble ; on trouve un meilleur passage pour Aramis. Broussailles, clôtures, ruisseaux boueux ; on galère. Non, ici aussi c'est vaseux, on ne passera pas les bêtes. Là, c'est meilleur. Tient une plateforme sableuse avec de l'eau et un peu d'herbe ; on pourrait faire la pause ici. Je me retourne : Aramis est en train de s'enfoncer dans le sable : encore un sable vaseux ! Cysco qui a les pieds plus larges marche sans problème mais Aramis avec ses petits sabots n'a pas trouvé d'appui. Je me rue sur elle, décharge les 60 kg de bagages et les jette plus loin ; Aramis est enfoncée jusqu'au ventre. Je la tire, la pousse, la supplie, lui crie dessus. Elle a les yeux exorbités par la peur. Un, deux, trois coups de reins : oui ! deux pieds ont trouvé un appui sur un sol plus stable. Elle se hisse, tremble, il faut sortir de ce fond de vallon trop dangereux. La route passe 100m plus haut. Moi, sur Cysko, Orlando à pied, on jaillit sur la route goudronnée. Allez, au premier point vert, on fait une pause 2 nuits, chacun a besoin de souffler.

19 juillet 2003
chacun souffle et se repose. Aramis dort à l'ombre d'un arbre. Je lui ferre deux pieds pendant q'Orlando fait la lessive. Puis sieste au soleil.

21 juillet 2003
C'est le bonheur de cheminer sur ce flanc de montagne avec Orlando. A midi, nous croisons un homme qui parle français ; c'est un turc qui vie en France et qui vient voir sa famille. Je lui demande au passage si il sait où l'on peut acheter un cheval ; 4 heures après, c'est chose faite après d'âpres négociations : une sympathique petite jument. La seule selle que l'on trouve est une selle de course, OK, embarquée. Nous ferrons la jument ; Orlando la nomme Gina.


Cheminer à deux est agréable, malgré la présence incessante de la gendarmerie. Olrando apporte soutien et protection…mais après deux mois de cheminement heureux il est temps de se quitter ; Orlando a besoin d'un plat de pâtes, d'un café et d'un vrai lit. Maman prend sa place et sa jument. Là aussi, la chevauchée est agréable et le foin dans les montagnes plus facile à trouver. Il est temps que je retrouve ma liberté et ma solitude avec l'hiver approchant. Chacun reviendra à la belle saison…


24 octobre 2003
Le village est un peu dispersé. Une maison est en train d'être élevée : deux hommes y travaillent. C'est la maison la plus près de la réserve de foin ; je m'y dirige. Les deux hommes sont souriants : " qu'est-ce que tu vends ? " me demandent-ils ? " pantalons, pulls ou chemises ? " en montrant les bagages de la mule… " Rien, Bonjour. Où est la maison du Murtar (le chef du village) ? ". les deux hommes me proposent de rester dormir chez eux, pas de problèmes pour le foin et les chevaux. Je suis " Mousafir ", mot magique qui, ici, signifie hôte. D'après le Coran, l'hôte ne craint rien, il est soigné et protégé. Soupir de soulagement. J'installe mes chevaux devant le foin. Cysko n'a pas encore repris toutes ses rondeurs après les temps de disette de cet été où j'allais lui cueillir les feuilles des arbres et tailler des roseaux pour le nourrir chaque soir. Depuis Erzincan, on renoue avec le foin. Pas toujours en suffisance en quantité ou en qualité, mais au moins, il est là.
[…]
La famille m'accueille ; les bagages sont rentrés dans la maison ; les voisins viennent voir ce qui se passe, observer cette touriste. Tout le monde est servit pour le repas. Dans la zone Kurde de la Turquie, tous ceux qui sont à l'heure du repas mangent. Un luxe : il y a une assiette pour moi avec les meilleurs morceaux du volatile. Une dizaine d'hommes sont attablés avec moi autour de la table sur les tapis qui jonchent le sol. Les femmes mangent après dans la pièce cuisine, à l'extérieur de la maison. La pièce principale où l'on mange est couverte de tapis et de coussins le long des murs, un poêle au milieu. Une autre pièce couverte de tapis et une souillarde. Maison de pierre à un étage et toit de terre ; c'est la maison classique de la région (…) Quand un des hommes attablés a finit de manger, il va s'asseoir contre l'un des murs et un autre prend sa place. Pas d'assiette, on se sert directement dans les plats avec une fourchette. (…) On m'installe mon matelas et je m'endors alors que chacun est encore en train de discuter. Mes bagages sont dans la pièce des hommes. Je m'endors tranquille…

29 octobre 2003
Sacré froid ! IL neige. Une piste boueuse doit me redescendre vers la vallée, celle qui mène en Iran, et quitter ce " putain " de plateau qui avoisine les 3000 m d'altitude et où ça pèle ferme en cette fin d'octobre.
[…]
Gina est un problème car elle ne sert plus à rien et tout le foin qu 'elle mange ne sera pas mangé par Cysko et Aramis. En chemin, pas de soucis, elle uit librement derrière avec sa petite selle de course à laquelle est accrochée la maréchalerie et la gourde. Certes, elle ne mange pas le tiers de ce que mange Cysko. Mais dès que j'arrive à le vendre je le fais. C'est triste mais elle n'a pas les papiers pour entrer en Iran et je n'ai pas l'argent pour la nourrir et le prix de sa vente devrait me faire vivre, moi et ma caravane, jusqu'au passage en Iran.

1er novembre 2003
Je vends Gina pour une bouchée de pain sur la place du bazar ; affaire conclue en 10 minutes. Je ne pourrais plus garder un cheval de plus et j'ai maintenant assez d'argent pour me rendre à la frontière. Je commençais à être vraiment sur mes toutes dernières réserves. Je suis un peu triste de me séparer d'une brave jument qui a joliment travaillé avec moi pendant 3 mois ; elle me faisait confiance. Aramis pleure et court de partout. Pendant 2 jours, elle ne va cesser de braire et d'appeler son amie. Etonnant, elles étaient pourtant tout le temps à se chipoter. Cysco hennit 2 fois et retourne à son foin : après tout l'essentiel, c'est l'estomac.

4 novembre 2003
C'est bon, je suis dans la vallée, dernière ligne droite avant l'Iran. A 2000 m d'altitude, la rivière que je suis prends sa source en Iran. Encore 130 km. […] Il fait beau, on voit la neige sur les montagnes à droite et à gauche ; je suis contente de les avoir quittées à temps. Avec un peu de chance, j'aurais passé le plus dure des montagnes iraniennes avant le grand froid de l'hiver.

8 novembre 2003: Diyadin-Dogobaysit
Joli chemin qui grimpe dans la colline. L'officier m'a déconseillé de passer par là : " il n'y a personne pour assurer ta sécurité, il y a un nid de terroristes et tu risques de te perdre ". je le regarde, sourit et poursuit ma route. Il m'a aussi formellement déconseillé d'aller en Iran où une femme seule ne peut pas survivre. Il me demande de lui envoyer des nouvelles par mail. Un gendarme vraiment charmant.
Oh ! quelle surprise sur la crête de la colline : un paysage indescriptible. Au fond, vient d'apparaître un mont immense couvert de neige ; une montagne qui dépasse toutes les autres, arrondie, douce, sans arête. Je regarde ma carte ; serait-ce le mont Ararat qui vient de s'offrir à mon regard ? Oui, je suis quasiment sûre. Il marque la frontière avec l'Iran ; c'est donc le cap à suivre.

10 novembre 2003: Murat camping
Murat camping est le refuge des âmes perdues, le havre de paix du voyageur avant l'Iran, là où tous les fous de la route et des sentiers, en route pour l'Asie où revenant de l'Asie se retrouvent, amenés là par le hasard, par Lonely planet, par des forces inconnues. Depuis 16 mois de voyage, je n'avais pas vu un seul touriste. Ce soir au camping, il y a 2 hollandais venus en 4x4 et en route pour l'Asie, un cycliste hollandais venue en pédalant à travers l'Europe, la Russie et la Turquie et en route vers la Chine, une cavalière française avec une mule, un cheval et un chien et un piéton polonais se déplaçant en bus et voulant, sans aucune connaissance de la montagne, grimper l'hiver le mont Ararat sans payer de guide…Nous mangeons ensembles, dans une petite pièce de restaurant, la seule qui possède un vague chauffage, mise à disposition l'hiver pour les campeurs. Soirée sympathique.
15 jours de siège à Murat camping.
[…]
j'œuvre pour le visa Iranien.(…) en attendant, je ferre les chevaux, bâte Aramis pour aller chercher les 30 kg de foin quotidien, déblaie la neige sur et autour de la tente, vais la nuit avec Saim (le jeune gars qui tient le camping) chasser le loup ou jouer au billard, discute avec les voyageurs de passage : celui qui fait le tour du monde à bicyclette, en camping-car, en 4x4, la japonaise qui débarque d'on ne sait où, le motard français, l'australien en stop, les deux ardéchois qui voyagent dans un ancien bibliobus. J'apprends à Saim à améliorer son anglais. C'est le Ramadan, le restaurant est fermé pour un mois et l'alcool interdit. Chacun dort où il veut ; sa voiture, sa tente, une des chambres glaciales, par terre dans le restaurant ou par terre dans la petite pièce où l'on mange et où chacun se sert devant le petit radiateur électrique.
La vue est superbe : le mont Ararat nous domine, blanc, isolé. Tout le paysage est blanc. La nuit, la vallée s'illumine de mille feux, le matin, la brume s'estompe après que le soleil ait inondé la vallée là-bas sous nos yeux. Tient mon visa vient d'arriver à Erzorum. (…).

27 novembre 2003: Vers l'Iran
Tant de gens m'ont dit de ne pas aller en Iran ; les gendarmes m'ont supplié de faire demi-tour " une femme seule en Iran, tu ne survivra pas 2 jours, des monstres, des barbares, des fanatiques".
Mais ma décision est prise : faire tant de chemin et renoncer là, par peur, aux portes d'un pays inconnu. Non, trop de gens m'ont dit du mal du pays suivant depuis le départ. Alors, je me méfie des avis de tant de gens. Il faut que j'aille voir et que je me fasse mon idée. Je me laisse 10 jours en Iran. Si après 10 jours, je sens que ma vie est en danger, je fais demi-tour et au moins j'en aurais la certitude. Il neige. Je pars peu rassurée : passer la frontière iranienne est un gros pas dans mon voyage ; le principal. J'aurais surmonté cette anxiété qui me sert le ventre, passer outre les avis de chacun, été jusqu'au bout de mon idée. Au Kurdistan Turc, j'ai marché la peur au ventre. Il n'en sera pas de même en Iran : soit le pays est agréable et je poursuis, soit il est dangereux et je rentre. Alors dans la neige et sans aucune visibilité dans ces montagnes, je prends le chemin de la frontière ; 30 cm de neige et ça tombre encore…




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